Un GRB (Gamma-Ray Burst) est une explosion cosmique intense de rayons gamma. C’est l’un des phénomènes les plus lumineux dans l’univers connu, qui émettent autant d’énergie en quelques secondes que le soleil en toute sa vie.

D’une durée allant de quelques millisecondes à plusieurs minutes, les GRB brillent des centaines de fois plus qu’une supernova typique et environ un million de milliards de fois plus que le Soleil.

Vue d’artiste : © ESO A. Roquette

Les GRB sont souvent associés à des événements astrophysiques tels que la formation des trous noirs ou la collision de deux étoiles à neutron.

Jusqu’à récemment, les GRB étaient sans doute le plus grand mystère de l’astronomie des hautes énergies. Ils ont été découverts par hasard à la fin des années 1960 par des satellites militaires américains qui étaient à l’affût d’essais nucléaires soviétiques en violation du traité d’interdiction des essais nucléaires atmosphériques. Ces satellites emportaient des détecteurs de rayons gamma puisqu’une explosion nucléaire produit des rayons gamma. Ils n’ont trouvé aucune violation du traité nucléaire, mais ils ont découvert des sursauts lumineux de rayons gamma provenant d’au-delà du système solaire !

A – Deux types de GRB

Il semble y avoir deux populations distinctes de GRB :

1 – Les sursauts longs avec un pic de flux de rayons gamma d’une durée supérieure à 2 s, dont on pense qu’ils ont des étoiles géantes pré-supernova comme progéniteurs. Les rafales de longue durée durent de 2 secondes à quelques centaines de secondes (plusieurs minutes), avec une durée moyenne d’environ 30 secondes. Ils sont généralement associés à la mort d’étoiles très massives, donc supernova.

2 – Les sursauts courts sont celles qui durent moins de 2 secondes. Les rafales de courte durée (allant de quelques millisecondes à 2 secondes avec une durée moyenne d’environ 0,3 seconde (ou 300 millisecondes), semblent être associées à la fusion de deux étoiles à neutrons en un nouveau trou noir ou bien d’une étoile à neutrons avec un trou noir pour former un nouveau trou noir plus massif.

Certes ces deux classes de sursauts sont créées par des processus différents, mais le résultat final dans les deux cas est un tout nouvel astre plus massif (magnétar ou trou noir).

Cependant, les scientifiques ont encore très peu d’informations sur le mécanisme par lequel l’énergie initiale est déposée, et ne savent toujours pas exactement comment une libération d’énergie aussi soudaine et catastrophique se produit. Voici une simulation réalisée par un supercalculateur de deux étoiles à neutrons entrant en collision, fusionnant et formant un trou noir. On pense que des événements comme celui-ci sont à l’origine de courts sursauts gamma.

Crédit : NASA/AEI/ZIB/M. Koppitz et L. Rezzolla

B – Détection des GRB :

Les GRB sont détectés par les satellites en mesurant la radiation émise par ces explosions cosmiques. Ces satellites disposent de détecteurs de rayons gamma très sensible qui peuvent mesurer l’intensité de cette radiation, la direction et sa durée, ce qui permet de déterminer la position approximative de la source dans l’espace.

Plusieurs satellites sont utilisés pour la détection des GRB :

Fermi gamma-ray Telescope : il s’agit d’un télescope spatial développé par la Nasa et l’agence spatiale européenne qui détecte les GRB dans la gamme de fréquence gamma.

 Swift Gamma-Ray Burst Mission : c’est un satellite de la Nasa pour étudier les GRB en mesurant leurs positions, leurs caractéristiques spectrales et temporelle, et en suivant le déclin de leur luminosité.

Integral (International Gamma-Ray Astrophysics Laboratory) : il s’agit d’un télescope européen destiné à l’étude des rayons gamma et de la matière noir dans l’univers.

D’autres instruments terrestres, tels que des télescopes optiques peuvent également être utilisés pour étudier les GRB et obtenir des informations supplémentaires notamment sur la détection de la contrepartie optique des GRB.

En effet, la contrepartie optique d’un GRB est la radiation émise dans la plage de longueur d’onde visible et proche infra-rouge qui est associée à l’explosion. Cette radiation est produite par la réaction en chaîne qui se produit lorsque le jet de particules émis par le GRB interagit avec l’environnement immédiat de la source. Cette contrepartie optique peut être utilisée pour en savoir plus sur la nature et l’origine des GRB. En effet, en mesurant l’intensité et la durée de la contrepartie optique, les scientifiques peuvent déterminer la distance approximative de la source et en apprendre davantage sur les mécanismes physiques à l’origine de l’explosion.

La découverte de la contrepartie optique a également permis aux scientifiques de mieux comprendre la structure, l’évolution, la position, les caractéristiques et l’impact des GRB sur l’environnement cosmique.

Plusieurs groupes d’astronomes et de scientifiques spécialisés dans l’étude des GRB travaillent sur des projets de recherches pour comprendre les mécanismes physiques à l’origine de ces explosions cosmiques pour explorer l’univers et en apprendre d’avantage sur sa structure et son évolution. Ces groupes sont souvent en collaboration avec des institutions et des agences telles que la Nasa, l’agence spatiale européenne et d’autres centres de recherches internationaux.

Les observations et les données recueillies par les satellites et les télescopes terrestres sont utilisées pour élaborer des modèles théoriques et pour tester les hypothèses scientifiques.

Le réseau GRANDMA (Gamma-Ray Burst Afterglow Network and Multi-Messenger Astronomy) est un groupe international de chercheurs et d’astronomes qui travaillent sur l’étude des GRB. Ce groupe a été créé pour coordonner les efforts de suivi des contreparties optiques des GRB et pour permettre un échange efficace d’informations et de données entre les différents observatoires et instruments impliqués dans l’étude de ces explosions cosmiques.

Logo GRANDMA

Les objectifs du groupe GRANDMA incluent la mise en place d’un réseau international de télescope pour le suivi en temps réel des GRB, la mise en œuvre de compagnes d’observations coordonnées et d’analyse des données obtenues pour en apprendre davantage sur les mécanismes physiques de ce phénomène, sur leur environnement et sur leur impact sur l’univers.

Observatoires terrestres du réseau GRANDMA

Le groupe GRANDMA travaille également en étroite collaboration avec d’autres groupes d’astronomes et scientifiques pour développer des théories et des modèles pour comprendre les GRB et pour explorer les questions encore non résolues dans ce domaine.

C – Et l’astronome amateur dans tout ça ?

L’astronomie est un domaine dans lequel la coopération Professionnelle/amateur ne peut être que fructueuse. En effet, les astronomes professionnels peuvent bénéficier de l’observation de nombreux phénomènes célestes par les amateurs qui se comptent en plusieurs centaines de milliers à travers le monde, tandis que les amateurs peuvent bénéficier de l’expertise et des ressources des professionnels pour améliorer leurs observations et leur compréhension de l’univers.

J’ai eu le privilège, via notre coopération Pro/Am avec l’université kadi Ayyad et l’observatoire de l’Oukaimeden sous les directives de son directeur le Professeur Z. Benkhaldoune, d’intégrer en mars 2022 le groupe GRANDMA et ainsi de participer à plusieurs compagnes de détection de contrepartie optique de plusieurs GRB à savoir :

  • GRB220408A
  • GRB220412A
  • BRG220430A
  • GRB220514A
  • GRB221009A
  • GRB221027B
  • GRB221028A
  • GRB221110A

Depuis leur plate-forme de communication et d’échange, on recevait des alertes SWIFT pour procéder à des observations qui devraient être faite le plutôt possible.

Alerte Swift depuis la plate-forme de GRANDMA

Il faut noter que la contrepartie optique (appelée afterglow optique) d’un GRB n’est pas systématiquement détectable. En effet, sa détectabilité dépond de plusieurs facteurs, notamment la distance de l’événement, la luminosité de la source, la capacité du télescope à détecter la lumière faible et la quantité de poussière et de gaz entre l’observateur et la source.

En général, les contreparties optiques les plus brillantes sont les plus facilement détectables, mais même les événements les plus brillants peuvent être masqués par la poussière et le gaz interstellaire. Par conséquent, il est courant que seule une fraction des GRB ait une contrepartie optique détectable.

Le 09 octobre 2022, une alerte GRB nommé GRB221009A est publiée dans la plate-forme GRANDMA pour effectuer une observation d’un potentiel GRB situé dans une galaxie dans la direction de la constellation de la flèche.

En quelques heures, plusieurs dizaines de télescopes partout dans le monde pointaient dans la direction de la source. J’étais de la partie lors de cette compagne internationale en pointant notre setup HAO1 (https://astromaroc.com/hao-1/).

Une vérification dans une database scientifique est préalablement nécessaire avant la séance d’acquisition. J’utilise pour cela le logiciel Aladin qui regroupe plusieurs databases scientifiques notamment : Simbad, VizieR…

Cette vérification permet de situer la source objet de l’alerte et surtout de s’assurer de la présence d’objet dans la position signalée. Effectivement, aucun astre n’est présent dans cette position quelque soit le catalogue choisi. Apres 1 heure 42 minutes d’acquisition, puis après avoir fait la calibration des images, leur alignement et enfin l’empilement :  surprise ! j’ai obtenu un SIGNAL POSITIF où la contrepartie optique est bien visible dans mes acquisitions exactement dans la position signalée.

Intégration de 34 poses unitaires de 180s

Suite à ce premier constat, j’effectue souvent une deuxième analyse depuis le logiciel Tycho Tracker pour s’assurer du résultat.

Suite à cette dernière vérification, j’ai envoyé l’image empilée (ou les subframes suivant les cas au format Fits) dans le cloud du groupe GRANDMA, afin de permettre aux professionnelles d’effectuer d’autres analyses plus poussées sur l’image empilée ou les images unitaires si c’est nécessaire.

L’implication des amateurs dans les efforts de poursuite des GRB peut aider les scientifiques à mieux comprendre ces phénomènes célestes uniques et à mieux déterminer leur distance et leur origine.

La coopération pro/am peut également aider à accroître l’engagement public pour la science et la recherche en astronomie.

D – Quand est-il du GRB221009A ?

Le 9 octobre, un faisceau de lumière le plus énergétique que les astronomes n’avaient jamais vu passer au-dessus de notre planète, aveugle temporairement les détecteurs de plusieurs satellites de la NASA. Le faisceau provenait d’un sursaut gamma, le type d’explosion le plus énergétique connu dans l’univers (en dehors du Big Bang), qui aurait accompagné la naissance d’un trou noir.

Les astronomes estiment que la source de GRB221009A se situe à environ 2,4 milliards d’années-lumière de la Terre. Certes, des sursauts gamma plus proches ont déjà été observés, mais ils n’ont pas été aussi énergétiques que GRB221009A, ce qui ajoute un statut spécial de l’événement.

Le télescope spatial X Swift a capturé la rémanence de GRB221009A environ une heure après sa première détection. La ligne verticale sombre dans limage ci-dessous est un artefact du système d’imagerie.

Nasa Swift_A. Beardmore (University of Leicester)

Le sursaut gamma du 9 octobre s’est démarqué par rapport aux sursauts gamma de longue durée observés précédemment. Ses photons bombardant les détecteurs des satellites pendant environ 10 minutes, et l’énergie contenue dans ces photons était supérieure à toutes celles qui avaient été mesurées auparavant. A 18 téraélectronvolts, certains des photons GRB221009A ont surpassé d’au moins un facteur deux les particules les plus énergétiques produites par le générateur de particules le plus puissant de la Terre.

La rémanence de l’éclatement, causée par l’interaction des rayons gamma avec la poussière cosmique, était également hors de l’ordinaire surpassant tout autre vu auparavant malgré le fait que le GRB221009A émanait d’une partie du ciel obstruée par la bande épaisse de la Voie lactée. Le sursaut était si puissant qu’il a ionisé l’atmosphère terrestre et perturbé les communications radio à ondes longues.

Bien qu’ils ne durent au mieux que quelques minutes, les sursauts gamma longs déclenchent des effets qui peuvent être observés pendant des semaines. Les astronomes recherchent également l’explosion de supernova qui a généré l’éclatement, qui expulse plus lentement la matière vers l’extérieur.

Lorsque les rayons gamma du sursaut initial interagissent avec la matière de l’univers environnant, ils produisent une rémanence qui couvre le spectre électromagnétique mais est mieux observée dans les longueurs d’onde des rayons X et radio.

Alors que la proximité relative d’un sursaut aussi puissant que GRB221009A est une aubaine pour la science, les astronomes ne souhaitent pas voir un sursaut gamma beaucoup plus près de la Terre. Surtout pas dans notre galaxie. Les scientifiques pensent qu’un sursaut gamma dirigé vers notre planète à une distance de quelques milliers de lumières-détruirait les couches protectrices d’ozone de la planète et déclencherait des changements dans l’atmosphère qui pourraient conduire à une ère glaciaire !

Rassurez vous, les GRB sont considérés comme étant très rares et ne se produisent que dans des galaxies très éloignées. La plupart sont également orientés de manière à ce que leur jet ne pointe pas directement la terre. Tout cela pour dire que la probabilité d’un GRB frappant la terre est considérée comme extrêmement faible.